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Produire un film autour de votre recherche permet-il, selon vous, de mettre en exergue des éléments visuels et sonores qui constituent une partie de votre recherche mais qui ne sont habituellement pas valorisés dans la thèse finale ?

Robert Rossi (Léo Taxil) : En ce qui me concerne, le film est une manière de communiquer sur le travail effectué.

Gabriele Salvia (La République des autoroutes) : Oui, la thèse devant souvent prendre la forme définitive d’un texte accompagné par des documents graphiques, elle ne valorise pas le processus d’étude de terrain.

Guillaume Marchessaux (Sea Walnut) : Oui, produire un film en lien avec ma recherche permet, par l’image, de montrer d’une manière moins fondamentale mon travail et ainsi de valoriser ma thèse d’une manière différente et ludique.

Elaine Brito (Jongo) : La production documentaire de ma recherche en format audiovisuel, entre autres formats médias, constitue le corpus de discours de l’étude sur les usages du patrimoine culturel. Ce corpus est mis en valeur dans une analyse très précise décrite en détail dans la thèse. La valorisation de cette production documentaire à travers une « écriture intermédiaire » (Muriel Lefebvre 2006), c’est-à-dire une écriture filmique ou encore en format webdocumentaire, n’est qu’une conséquence de cette analyse.

 

Des images peuvent être produites par le chercheur au cours de son étude, constituer un matériau, ou encore être une façon de faire connaître ses résultats. Quel statut ont les images constituant votre film ?

Robert Rossi : Dans mon cas, les images ont une valeur d’illustration d’une recherche essentiellement littéraire.

Gabriele Salvia : Les images de « La République des autoroutes » s’adressent à un public qui n’est pas forcement spécialiste des questions liées à l’architecture et à l’urbanisme. Par le langage du cinéma, elles permettent d’élargir la réflexion à différents domaines et publics de manière directe et concise.

Guillaume Marchessaux : Les images présentées dans mon film permettent de montrer de manière réelle les différentes facettes de ma recherche et ainsi le recours à l’image permet de montrer un certain nombre de résultats. De plus, certaines images peuvent servir de support pour expliquer un protocole.

Elaine Brito : Je les considère comme la « représentation documentaire » de la recherche, telle la notion de Cécile Tardy (2012).

 

Qu’est-ce que l’exercice consistant à changer de médium pour parler de sa recherche a pu vous apprendre ?

Robert Rossi : L’exercice de changer de médium m’a permis avant tout de synthétiser ma pensée et d’appréhender le travail de montage.

Gabriele Salvia : L’exercice de choisir comment et quoi filmer du terrain d’étude m’a permis de faire l’inventaire des situations urbaines récurrentes ou singulières des territoires de l’autoroute. Par exemple, en parcourant les abords de l’autoroute, j’ai pu constater la succession de différentes situations urbaines (ville dense, grands ensembles, urbanisme commercial et pavillonnaire) qui sont en rapport d’interdépendance avec l’infrastructure. De même, le regard du réalisateur, avec qui j’ai écrit et réalisé le film [Romain Rondet], m’a permis de confronter mon ressenti personnel avec celui d’un autre « étranger » du terrain.

Guillaume Marchessaux : Cela m’a permis d’organiser mes idées le plus clairement possible mais également de vulgariser au maximum mon travail. Cela permet donc de recentrer mon étude dans son contexte. Le recours au film est pour moi le moyen de montrer l’avancée de mes recherches mais également de sensibiliser le public au problème écologique que sont les espèces invasives qui sont peu connues.

Elaine Brito : C’est un travail qui exige la concentration de différents sens (vision, ouïe, tactile, etc.) soit sur le moment de la production de l’image, soit au moment de l’analyse (montage). Donc, je pense que cette méthode permet le prolongement de l’expérience de l’étude de terrain.

 

Quel(s) mot(s) ou locution(s) choisiriez-vous pour qualifier l’exercice filmique que vous avez réalisé : un exercice de synthèse, de valorisation, de médiatisation, une mise en récit de votre démarche ?

Robert Rossi : C’est ça ! Essentiellement, comme je le disais, synthèse, communication et valorisation du travail effectué.

Gabriele Salvia : Pour « La République des autoroutes » il s’agit d’une mise en récit de la première étape de ma démarche de recherche, notamment l’appréhension du milieu d’étude par l’observation de terrain d’un promeneur « non instruit » du contexte.

Guillaume Marchessaux : L’exercice filmique pour moi est une manière de valoriser mon travail mais également de le médiatiser. Dans le contexte de mon étude, il y a de forts enjeux socio-économique et écosystémique qui concernent la société dans son ensemble.

Elaine Brito : Le film « Jongo » est une première écriture filmique, qui serait une toute petite représentation de mon objet d’étude, l’usage politique du patrimoine culturel. Pourtant, l’ensemble de l’écriture filmique croisée avec les autres formats de discours (audio, photo, article presse, texte, cartes, etc.) forme la totalité du corpus de discours de la recherche. Ce corpus disposé sur un « architexte » (Jeanneret et Souchier) peut être analysé en profondeur et aura comme conséquence l’écriture d’un webdocumentaire. Ce webdoc peut représenter l’annexe de la thèse mais aussi avoir le rôle de médiateur patrimonial.

 

Comment vous paraît-il judicieux d’accompagner votre film lors de sa présentation publique ?

Robert Rossi : Par une petite présentation orale de la thèse qui a été éditée en 2015.

Gabriele Salvia : Il me semblerait nécessaire de pouvoir expliquer ma démarche de recherche afin de situer le moment qui a fait l’objet du film dans le cadre plus vaste de la thèse.

Guillaume Marchessaux : Il me parait judicieux d’expliquer le contexte de l’étude avant de visionner le film. De plus, apporter des organismes vivants lors de la séance permet de montrer au public cette espèce présente dans la région mais peu connue.

Elaine Brito : Cette écriture filmique a été réalisée pour une communication au colloque international d’anthropologie à l’Université de Coimbra, en juin 2016. Donc, c’est une représentation documentaire de la thèse qui demande quand même, selon moi, une présentation théorique du contexte, de l’histoire et surtout de la mémoire de ce patrimoine qui est portée par les habitants du Quilombo São José da Serra, praticiens et détenteurs du Jongo.